Intégrer les enjeux de gestion quantitative de l’eau dans le PLUi (CA La Rochelle)
2022 | FICHE, RETOUR D’EXPERIENCE
Résumé
Dans son PLUi, la communauté d’agglomération de la Rochelle intègre progressivement plusieurs des enjeux de gestion quantitative de l’eau. Dès 2019, elle mobilise plusieurs outils pour protéger les zones humides : orientation du PADD, zonage spécifique et dispositions associées, Orientation d’Aménagement et de Programmation (OAP) thématique « Paysages et Trame verte et bleue ». En 2022, une modification de droit commun lui permet d’intégrer les enjeux de gestion des eaux pluviales dans plusieurs OAP thématiques (Mobilités, Paysage et trame verte et bleue, Construire aujourd’hui) ainsi que dans le règlement écrit afin d’atteindre l’objectif de zéro rejet sous une pluie centennale. Afin de faciliter l’appropriation de ces nouvelles obligations, l’Agglomération travaille également sur des guides techniques destinés aux aménageurs et urbanistes.
Contexte
Depuis 2014, la communauté d’agglomération de la Rochelle regroupe 28 communes sur un territoire de 327 km² avec environ 175 000 habitants. Ce territoire attractif se caractérise par ses 70 kilomètres de côtes, ses deux tiers de terres agricoles et ses 10% de marais (figure 1. Depuis sa création, la collective exerce la compétence urbanisme et élabore à ce titre un Plan Local d’Urbanisme intercommunal (PLUi). Afin d’harmoniser le développement démographique et économique du territoire, tout en préservant le cadre de vie, l’Agglomération a approuvé un nouveau PLUi à l’échelle de ses 28 communes en 2019.
Figure 1: Paysage de la communauté d’agglomération de la Rochelle (Source : communauté d’agglomération de la Rochelle)
Problématique et objectifs
Au moment d’élaborer le nouveau PLUi, la communauté d’agglomération de la Rochelle est devenue compétente en matière de GEMAPI. Dès son approbation en 2019, le PLUi a donc intégré des enjeux de protection des zones humides. Début 2022, les élus ont ensuite voté en faveur d’une modification de droit commun du PLUi qui permettra notamment d’ajouter les enjeux de gestion des eaux pluviales. Le PLUi de la Rochelle intègre ainsi progressivement plusieurs des enjeux liés à la gestion quantitative de la ressource en eau.
Solutions et résultats
Depuis le 1er janvier 2018, la collectivité exerce la compétence GEMAPI. Aussi, elle a pris en compte la protection des zones humides à chacune des étapes d’élaboration du PLUi.
Dans le cadre des études préalables à l’élaboration du PLUi, la communauté d’agglomération de La Rochelle a réalisé un diagnostic à grande échelle de l’ensemble de ses zones humides en concertation avec les acteurs locaux. Elle s’est appuyée pour cela sur la méthodologie d’inventaire définie par l’institut interdépartemental du bassin de la Sèvre Niortaise (IIBSN) qui a été appliquée à chacune des communes de l’Agglo. Ce travail a été réalisé par le bureau d’étude Biotope avec le soutien financier des Agences de l’eau Loire-Bretagne et Adour-Garonne et l’accompagnement technique du Forum des Marais Atlantique. Cet inventaire a permis de caractériser les 6500 hectares de marais (environ 20% du territoire) et 390 ha de zones humides ordinaires (1,6% du territoire).
- Ces zones humides inventoriées ont ensuite été prises en compte dans les différents documents constitutifs du PLUi. Deux orientations du PADD traduisent la volonté politique de protéger les zones humides :
- Orientation 5A2 sur la préservation des espaces à dominante naturelle, notamment l’ouverture à la découverte,
- Orientation 7B2 sur la protection des ressources, notamment en eau.
- Plusieurs outils du PLUi sont ensuite utilisés pour protéger ces zones humides : zonage, règlement, OAP. Les zones humides font tout d’abord l’objet d’un zonage réglementaire et de dispositions spécifiques. En effet, dans ces zones :
- sont interdits tout usage, affectation des sols, activité ou construction, de nature à compromettre la sauvegarde des zones humides telles que définies à l’article L.211-1 du code l’environnement, à l’exception des ouvrages nécessaires à la protection des biens et personnes et à la réduction des risques naturels ;
- les clôtures doivent être conçues de manière à réduire au maximum la gêne au libre écoulement des eaux et assurer la protection contre les inondations ;
- les clôtures doivent être conçues de manière à faciliter les continuités écologiques ;
- sont interdits les exhaussements et affouillements du sol d’une superficie supérieure à 100 mètres carrés et d’une hauteur, s’il s’agit d’un exhaussement, ou d’une profondeur, dans le cas d’un affouillement, excédant un mètre ;
- sont interdits les dépôts de matériaux.
Figure 2 : Marais (à gauche) et zones humides (à droites) inventoriées sur le territoire de la communauté d’agglomération de la Rochelle.
- De plus, l’Agglo de la Rochelle a mis en place une orientation d’aménagement et de programmation (OAP) thématique « Paysages et Trame verte et bleue ». Celle-ci préconise notamment dans les réservoirs de biodiversité associés aux zones humides :
- éviter le surpâturage et l’amendement des prairies ;
- maintenir un pâturage extensif ;
- réglementer le remblaiement et les déblaiements ;
- préserver physiquement les zones humides (éviter l’urbanisation sur leur emprise) ;
- appliquer des modalités d’aménagement qui ne portent pas atteinte à leur bon fonctionnement (préservation liens hydrauliques alimentant la zone humide et gestion de ses abords, gestion des eaux résiduaires urbaines et pluviales, maîtrise des pollutions diffuses, etc.).
- Depuis le 1er janvier 2020, l’Agglomération est devenue compétente en matière de gestion des eaux pluviales urbaines. Aussi, la modification de droit commun du PLUi prescrite début 2022 pour prendre en compte les nouveaux besoins du territoire a notamment pour objectif d’intégrer les problématiques liées à la gestion des eaux pluviales urbaines.
Le projet de modification du PLUi envisage ainsi d’intégrer la gestion des eaux pluviales dans plusieurs OAP thématiques (Mobilités, Paysage et trame verte et bleue, Construire aujourd’hui) et spatialisées, ainsi que dans le règlement écrit. L’objectif de ce dernier est d’atteindre le zéro rejet jusqu’à la pluie centennale ! Pour cela, la modification du PLUi fera évoluer les coefficients de biotope (cf. encadré) et des coefficients pondérateurs dans les zones urbaines (U) et à urbaniser (AU). Les nouvelles dispositions du PLUi devrait être appliqué à partir de janvier 2023.
- Selon l’article L 151-22 du Code de l’urbanisme, « le règlement peut imposer une part minimale de surfaces non imperméabilisées ou éco-aménageables, éventuellement pondérées en fonction de leur nature, afin de contribuer au maintien de la biodiversité et de la nature en ville ». Plusieurs coefficients sont ainsi mobilisés par les collectivités en charge de l’élaboration des PLU :
- coefficient de biotope: part de surfaces éco-aménageables sur la surface de la parcelle. Chaque type de surface est multiplié par un coefficient compris entre 0 et 1 qui définit son potentiel (par exemple : 0 pour un sol en asphalte, 0,7 pour une toiture végétalisée, 1 pour un sol en pleine terre)
- coefficient de pleine terre: part de surfaces de pleine terre sur la surface de la parcelle. Un espace de pleine terre est perméable (en continuité avec la terre naturelle) et végétalisable (disponible au développement de la flore)
En parallèle, l’Agglomération développe une démarche qualité, « le PACTE » pour intégrer la gestion intégrée des eaux pluviales aux projets d’aménagement et de construction. Afin de faciliter l’appropriation de cette démarche par les aménageurs, elle a réalisé en 2021 un guide technique sur la gestion des eaux pluviales dans les projets d’aménagements.
Par ailleurs, la modification de droit commun du PLU permettra également d’intégrer les projets d’envergure tels que La Rochelle Territoire Zéro Carbone et les politiques stratégiques en cours d’élaboration comme le Plan Climat Air Energie Territorial ou le nouveau schéma directeur des eaux usées. En ce qui concerne la ressource en eau, un Projet de Territoire pour la Gestion de l’Eau (PTGE) et un Contrat Territorial pour les Milieux Aquatiques (CTMA) sont également en cours d’élaboration.
Limites et conditions de réussite
La Communauté d’Agglomération de la Rochelle est une intercommunalité ancienne qui exerce la compétence urbanisme depuis de nombreuses années. En 2010, la tempête Xynthia a sensibilisé les élus et les personnels des services aux enjeux de gestion de l’eau. Aussi, lors de la prise de compétence GEMAPI puis GEPU, les services urbanisme se sont facilement approprié ces enjeux.
L’intégration des enjeux de gestion quantitative au PLUi est facilitée par les échanges réguliers entre les services Eau et Urbanisme. Les services Eau sont par exemple chargé de l’instruction du volet eau des permis de construire.
Aspects économiques
Les intercommunalités sont responsables de l’élaboration du PLUi sur leur territoire. La communauté d’agglomération de la Rochelle a cependant bénéficié du soutien financier des Agences de l’eau Loire-Bretagne et Adour-Garonne pour la réalisation de l’inventaire des zones humides. De même, l’Agglomération de la Rochelle a été lauréate de l’appel à initiatives « Gestion des eaux pluviales intégrée à l’aménagement urbain » lancé par l’Agence de l’eau Loire-Bretagne fin 2019. Les études et travaux liés à la gestion intégrée des eaux pluviales sont ainsi subventionnées à 50%.
Ils l’ont fait, ils en parlent
« Dans le PLU, la collectivité intègre progressivement toutes les compétences en lien avec la gestion quantitative de l’eau. Si on agit beaucoup sur les aspects techniques de gestion de l’eau, on doit cependant encore faire des efforts en ce qui concerne les changements des comportements, à l’image du guide à l’attention des aménageurs »
Image d’en tête : Le port de la Rochelle (c) Tynp sur Pipxabay
Image de fond : Le port de la Rochelle (c) weareaway sur pixabay
Contact
Florence Nassiet,
Adjointe du directeur des Etudes Urbaines
florence.nassiet@agglo-larochelle.fr
Liens
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