Etiage du Chéran à Lescheraines (2020), crédit Florian Pépellin, CC BY-SA 4.0

Instruction du 14 décembre 2023 relative à la gestion quantitative de la ressource en eau et des sécheresses

COLLECTIVITES, GESTION DE LA RESSOURCE

Contexte

Les lignes directrices relatives à la politique de gestion quantitative de la ressource en eau et aux situations de sécheresse ont été données par le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires dans une instruction du 14 décembre 2023. Ces grandes lignes viennent compléter le cadre réglementaire en place, notamment les décrets n° 2021-795 du 23 juin 2021 et n°2022-1078 du 29 juillet 2022, qui définissent des mesures de gestion structurelle.

Résumé

Face à l’accélération tangible du changement climatique, l’instruction du 14 décembre 2023 rappelle la nécessité de changement d’approche du cycle de l’eau et du fonctionnement des écosystèmes naturels. Le contexte climatique actuel, à la fois nouveau et structurant pour l’avenir, sous-tend donc l’ensemble de ce cadre réglementaire qui a pour objectif d’améliorer la gestion structurelle des ressources en eau de l’Hexagone.
Cette instruction vient préciser les modalités de gestion quantitative de l’eau autour de plusieurs lignes directrices, dont le leitmotiv semble être la cohérence. Les préfets coordonnateurs de bassin sont en effet invités à définir et mettre en place des stratégies d’étude de volumes prélevables, mais aussi à veiller à la cohérence entre les différents outils de gestion (PTGE, SDAGE, AUP…).

Des précisions sont données dans 5 fiches qui constituent les annexes et le rôle important des préfets y est entériné.

Les grandes lignes de l’instruction

  • Établir les volumes prélevables pour assurer la cohérence entre gestion structurelle et conjoncturelle
    « Garder une cohérence territoriale entre la gestion structurelle (gestion durable de la ressource en eau) et la gestion conjoncturelle (gestion de crise liée aux situations de sécheresse), qui n’a pas vocation à pallier couramment des écarts entre les autorisations de prélèvement délivrées et les capacités réelles de la ressource » : le ton est donné dès le début de l’instruction.
    L’établissement de volumes prélevables à l’étiage doit servir de boussole pour le retour à l’équilibre structurel d’un bassin. Des études doivent être menées en ce sens et le préfet coordonnateur de bassin est chargé de définir « sans tarder » et de piloter une stratégie d’évaluation des volumes prélevables.
    Si l’équilibre structurel doit être visé et assuré, « les processus de renouvellements d’AUP ou de demandes de nouvelles AUP à court terme doivent se poursuivre sans attendre » précise cependant l’instruction. L’opportunité de réviser, mettre à jour ou compléter les études existantes de volumes prélevables à l’étiage relève de la stratégie du préfet coordonnateur de bassin, et il n’est pas nécessaire de réviser systématiquement ces études lors de la publication ou du renouvellement des AUP.
    La fiche 5 précise par ailleurs le cas des Zones de Répartition des Eaux (ZRE). Si ces zones restent prioritaires, « la procédure de retour à l’équilibre, ou de maintien de celui-ci, ne doit ainsi pas être engagée, ou poursuivie, uniquement sur les ZRE actuelles, mais sur tous les bassins en déséquilibre ou sur le point de l’être. » La logique serait de classer en ZRE l’ensemble des bassins en déséquilibre identifiés dans le SDAGE. Toutefois, le classement en ZRE reste soumis à l’appréciation du préfet coordonnateur de bassin ; si un PTGE et la mise en place d’une gestion collective des prélèvements pour l’irrigation peuvent suffire à assurer un retour durable à l’équilibre quantitatif, le classement en ZRE ne s’impose pas.
  • Articuler les outils de gestion territoriale de l’eau
    La cohérence de la gestion territoriale de la ressource hydrique doit également être assurée à travers l’articulation entre les différents outils de gestion (SAGE, PTGE, AUP, etc.) des territoires pour atteindre le retour à l’équilibre. Un lien doit être établi entre le programme de mesures pour le retour à l’équilibre quantitatif des PTGE ou SAGE et les éléments d’information à apporter dans le dossier de demande d’autorisation unique de prélèvement (AUP). L’instruction précise que « les nombreux contentieux, dans certains secteurs, sur la construction de réserves sont en partie alimentés par l’absence de lien entre ces retenues et les réductions de prélèvements directs à l’étiage. Il est désormais essentiel de mieux établir ces liens. »
    Evaluations, études, AUP ainsi que SAGE et PTGE doivent tous être en cohérence et viser à assurer le maintien pérenne de l’intégrité de la ressource.
  • Mieux informer et communiquer sur les stratégies de gestion quantitative et les études
    La stratégie du préfet coordonnateur de bassin sur les volumes prélevables se doit d’être claire et facilement disponible pour le grand public dans une note – diffusée sous la forme d’une page ou d’un site web. Sans note récapitulative portant les éléments de cette stratégie et des études existantes, c’est le SDAGE qui vaut stratégie de bassin.
  • Mise au point sur les études
    L’instruction fait également une mise au point sur les études des volumes prélevables. Elle expose notamment les différences entre les études de volumes prélevables et les études relatives aux volumes « hors périodes de basses eaux » qui pourraient être rendus disponibles aux usages anthropiques. Pour l’instruction, ces deux types d’études n’ont pas les mêmes objectifs, car leurs périodes de validité ne comportent pas les mêmes enjeux.
    L’objectif des études de volumes prélevables à l’étiage est de fixer le niveau maximal d’autorisation de prélèvements pour assurer l’équilibre à l’étiage – et ce, bien qu’elles ne soient pas aussi exhaustives que les études d’impact environnemental qui doivent être menées, notamment en cas d’AUP.
    Les études « hors période de basses eaux » ont, elles, un « objectif d’amélioration de la connaissance de la situation des prélèvements et de stockages existants au regard de l’hydrologie annuelle des nappes ou des cours d’eau ». Ainsi, les études hors étiage doivent permettre « d’éclairer de manière objective au sein des démarches de PTGE ou de SAGE, les débats sur les réponses qui pourraient être données aux différentes trajectoires dynamiques des besoins. » Elles doivent contenir un volet prospectif tenant compte des effets prévisibles du changement climatique sur la ressource hydrique.
    Cependant, compte tenu des capacités de portage et de financement parfois difficiles de telles études, « priorité devra être donnée à la réalisation des études d’évaluation des volumes prélevables à l’étiage manquantes ou à réviser ».
    La fiche 3 précise par ailleurs qu’« a contrario, les délais de certains renouvellements d’autorisation [AUP, ndlr] à venir à court ou moyen terme ne sont pas compatibles avec la réalisation de nouvelles études d’évaluations longues et complexes. Ces renouvellements doivent être menés indépendamment de ces études. »
  1. Lignes directrices
  2. Fiche n° 1 : Les volumes prélevables en période de basses eaux et leur répartition entre usages
  3. Fiche n° 2 : Evaluation des volumes « hors période de basses eaux » (mise en œuvre du décret du 29 juillet 2022)
  4. Fiche n° 3 : Les autorisations uniques de prélèvement d’eau pour l’irrigation (AUP)
  5. Fiche n° 4 : Le plan annuel de répartition (PAR)
  6. Fiche n° 5 : La zone de répartition des eaux (ZRE)
Dernière modification le 29/04/2024

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